MONTRÉAL

MONTRÉAL
MONTRÉAL

Deuxième agglomération francophone au monde après Paris, Montréal affiche dans la Fédération canadienne de profondes originalités. Elle associe à merveille le cosmopolitisme de ses habitants à l’ambiance nord-américaine et mêle harmonieusement dans son paysage un ensemble de gratte-ciel d’acier et de verre et une petite colline volcanique couronnée par une forêt. Mais, avec au loin les Laurentides au nord et les Appalaches au sud, le cadre de l’archipel montréalais est avant tout le fait d’une plaine truffée de lacs jalonnant les multiples ramifications d’un des plus prestigieux fleuves de l’Amérique septentrionale. Car Montréal est fille du Saint-Laurent. C’est à cela qu’elle doit sa fonction légendaire de grand port intérieur, de centre de commerce des fourrures puis de métropole économique du pays jusqu’à la fin des années 1970, où le leadership lui a été ravi par Toronto.

Excellence de la position géographique et du site

Alors qu’elle a dépassé, à la fin de 1988, la barre des 3 millions d’habitants et qu’elle a célébré avec éclat, en 1992, ses trois cent cinquante années d’existence, l’agglomération montréalaise a toujours su tirer le meilleur parti d’une position géographique exceptionnelle. À l’intersection de trois voies de transport essentielles, Montréal était prédisposée à devenir un lieu fondamental de la vie d’échanges au sein de tout l’espace canadien, un point clé du transbordement. À 1 500 kilomètres de l’océan Atlantique, l’archipel de Montréal occupe le centre d’un carrefour de trois voies naturelles, où la convergence des cours d’eau a construit une plaine aux alluvions riches et épaisses. En direction de l’est, le majestueux Saint-Laurent procure l’ouverture sur l’Atlantique tandis que dans le sens opposé il assure la jonction avec les Grands Lacs, authentique mer intérieure aussi vaste que les îles Britanniques. Vers le nord-ouest, la rivière des Outaouais permet la liaison avec l’immense Ouest canadien. Vers le sud, enfin, le corridor rectiligne Richelieu-Champlain-Hudson relie directement Montréal à New York. On comprend que l’exemplarité de cette convergence de cours d’eau ait été à l’origine d’une fonction portuaire considérable, que Montréal s’empressa de ravir à Québec, pourtant bien située au débouché du Saint-Laurent sur le golfe. Cependant, ce point de concours de trois axes fluviaux n’explique pas à lui seul la naissance de la deuxième concentration urbaine du Canada contemporain. À la conjonction d’un archipel et d’une plaine viennent s’ajouter ici les rapides de Lachine qui marquent la limite de toute navigation océanique vers l’intérieur des terres, situation qui ne prit fin qu’en 1959 grâce à l’ouverture de la «voie maritime». Barre rocheuse précambrienne s’interposant sur le cours du fleuve, ces rapides dictèrent l’emplacement des installations portuaires le long du Saint-Laurent à l’est du mont Royal, qui, malgré son altitude modeste de 230 mètres, fit office dès le départ de bon site défensif.

1642-1992: trois siècles et demi de développement ininterrompu

C’est sous le nom de Ville-Marie que Montréal est fondée le 18 mai 1642 par Paul de Chomedey de Maisonneuve au pied sud du «Mons Realis» qui avait été découvert par Jacques Cartier le 2 octobre 1535. À l’époque où celui-ci explora l’archipel, l’île de Montréal était peuplée de Hurons. C’est pour convertir les tribus de la région que fut organisée la mission de 1642, forte d’une cinquantaine de personnes se fixant près du village indien de Hochelaga. Autant missionnaires que pionniers, les cinquante fondateurs déclenchèrent en ces lieux favorisés par la nature un processus de colonisation qui procure aujourd’hui un bel exemple d’aménagement du territoire. Rien d’étonnant à ce que la croissance de la population soit à l’image de la qualité du site et des aménités de la situation géographique: les données chiffrées mentionnent 27 997 habitants en 1831, 44 485 en 1844. Le million de personnes est atteint en 1940; après 1945, l’extension de l’agglomération s’effectue au-delà des îles et, en 1990, la région métropolitaine de recensement de Montréal compte 3 068 100 habitants sur une superficie de 2 500 kilomètres carrés. La densité humaine, de 1 225 habitants par kilomètre carré, est l’une des plus élevées parmi les grandes concentrations urbaines de l’Amérique du Nord.

Spécificité de l’agglomération montréalaise

La morphologie urbaine et les paysages de Montréal sont tels qu’il est difficile de classer cette nébuleuse trimillionnaire dans une catégorie bien précise. S’il est incontestable que la métropole laurentienne est typiquement nord-américaine, il est tout aussi évident que son passé autant que sa palette ethno-culturelle actuelle en font une sorte de cas à part non seulement à l’échelle du continent ou à celle du pays, mais aussi au niveau même de la province du Québec. La romancière Gabrielle Roy a raison d’écrire que «Montréal pense et souffre en deux langues», car c’est le bilinguisme français-anglais qui frappe dès l’abord, le boulevard Saint-Laurent faisant fonction de ligne de démarcation. Même si l’on peut parler d’une zone tampon entre l’est et l’ouest (ou plus exactement l’est - nord-est et le sud - sud-ouest), la zonation ethno-culturelle entre les deux Montréal demeure très nette: d’un côté, à l’est, c’est Outremont avec sa population francophone issue en majeure partie du milieu rural québécois; il s’agit globalement de familles nombreuses dont les revenus sont bien souvent moyens. À Outremont, ancienne seigneurie française, fait opposition, de l’autre côté, Westmount. Cité de beaux arbres, des grands parcs et des demeures autant silencieuses que somptueuses, c’est incontestablement l’un des quartiers les plus british que l’on puisse trouver dans les villes du Canada. Cependant, ses caractéristiques inverses par rapport à Outremont s’inscrivent dans une communauté urbaine qui présente toutes les facettes d’une ville nord-américaine.

Presque aussi étendue que l’agglomération parisienne alors qu’elle est trois fois moins peuplée, Montréal montre, autour de son centre, un desserrement de l’habitat tout à fait caractéristique des cités du Nouveau Monde. Cet aspect aéré – qui ne contredit en rien la forte densité humaine – est rendu plus sensible par les dégagements qu’occasionne le site: en multipliant les plans d’eau, l’insularité favorise l’étalement des espaces urbanisés. À cet égard, Montréal est très grosse consommatrice de terrain. Toutefois, deux phénomènes de densification sont perceptibles: le surpeuplement des quartiers ouvriers francophones et le monumental Quartier central des affaires, fierté de la décennie 1960-1970 au même titre que la Ville-Marie, première ville souterraine au monde par son ampleur.

Coincé entre le mont Royal et le Saint-Laurent, le centre de l’agglomération présente un double visage, dont les aspects peuvent paraître diamétralement opposés. Autour de la rue Notre-Dame, de la place d’Armes et de la place Jacques-Cartier s’agrège le Vieux-Montréal, dont la restauration est pratiquement achevée. Les magasins d’antiquités côtoient les boutiques les plus originales, et non loin des écuries rénovées de la place d’Youville se dressent deux églises parmi les plus anciennes que compte le Canada. Notre-Dame-de-Bon-Secours, construite en 1772, est le plus vieux lieu de culte de Montréal: chapelle des marins, elle se singularise par son intérieur en trompe l’œil. À proximité se dresse l’église néo-gothique Notre-Dame qui date du début du XIXe siècle.

Dominé par plusieurs gratte-ciel qui rivalisent de hardiesse, le Quartier central des affaires s’étage sur trois niveaux: celui des édifices toujours plus hauts, celui de la rue (boulevard Dorchester, rue Sainte-Catherine), celui de la ville souterraine où l’on a l’impression que l’homme vit en serre. Parmi les ensembles immobiliers, on doit faire mention de la place Ville-Marie (1962) et du complexe Desjardins (1976). Là bat le cœur de l’agglomération et s’impose l’image de la cité nord-américaine. Autour de ce centre passablement dense et où se posent d’épineux problèmes de circulation, que le métro ne parvient qu’incomplètement à résoudre, se dispose une demi-couronne d’anciens quartiers (le péricentre), qui précède les auréoles des banlieues s’égrenant le long des axes de communication. Celles-ci se caractérisent par une fonction dominante, comme l’industrie à Terrebonne, ou bien s’affichent encore comme de gros villages, tels Longueil ou Saint-Lambert.

Si l’on se plaît à souligner le bilinguisme (67 p. 100 de francophones, 20 p. 100 d’anglophones), on ne doit pas négliger la mosaïque des autres groupes linguistiques présents à Montréal. Dans le centre tout particulièrement, on parvient à individualiser sans peine les quartiers juif, grec ou italien, témoins d’une période où les vagues d’immigration étaient très nombreuses et où Montréal a assis une prospérité économique qui a longtemps fait d’elle la métropole incontestée de tout le Canada.

L’économie montréalaise: permanences, mutations, problèmes

Le schéma du développement économique est classique de tous les carrefours où convergent divers modes de transport. Sur la fonction industrialo-portuaire se greffe celle de centre de collecte et de redistribution. À l’«équation-circulation» s’ajoute la propension à abriter des sièges sociaux de compagnies ferroviaires ou aériennes ou encore d’établissements financiers et commerciaux. Ce canevas ne subit pas de mutations sensibles jusqu’en 1959, année où l’ouverture de la voie maritime du Saint-Laurent va contribuer à diminuer l’importance de Montréal comme centre de transbordement. Désormais, la suppression de la rupture de charge durant au moins huit mois par an entraîne un tassement du trafic du port. Le tonnage plafonne légèrement au-dessus de 20 millions de tonnes (21 831 000 t en 1990), et Montréal ne représente plus qu’un tiers du tonnage de Vancouver, en se classant juste derrière Port-Cartier et Sept-Îles. Parallèlement, l’augmentation du transport par conteneurs favorise les ports côtiers (Saint John, Halifax).

À cette évolution s’additionne l’impitoyable concurrence de Toronto, dont la position géographique est beaucoup plus centrale que celle de Montréal et qui se trouve davantage à proximité des grands centres industriels traditionnels des États-Unis. Depuis le début des années 1970, les structures industrielles montréalaises relativement faibles et un secteur tertiaire trop axé sur les transports aux dépens des finances ont décliné inexorablement devant la montée en puissance de la métropole ontarienne. Le phénomène était déjà perceptible au milieu des années 1960 puisque, entre 1951 et 1966, l’écart entre les populations de Toronto et de Montréal se réduit de 24 à 13 p. 100. Au début des années 1990, la situation s’est radicalement inversée, et les données statistiques parlent d’elles-mêmes.

Il faut néanmoins estimer à leur juste valeur les atouts incontestables dont continue à disposer Montréal, en particulier la pérennité d’une vocation pour les congrès et les grandes rencontres internationales. En 1967 s’est tenue l’Exposition universelle et en 1976 se déroulèrent les jeux Olympiques d’été, à la faveur desquels fut créée une ville sportive dans la ville.

À bien des égards, Montréal donne l’impression d’une ville humaine, où la connotation européenne – entre autres française – n’est jamais absente; on n’est pas dans «une mécanique à voitures» qui symbolise fréquemment la ville nord-américaine. À Montréal, les relents d’exotisme se marient bien avec un côté bon enfant et un peu bohème. Le mont Royal semble synthétiser les mille et une facettes de la cité: premier lieu de pèlerinage de toute l’Amérique du Nord, l’oratoire Saint-Joseph rappelle l’appartenance du Québec à la vieille souche chrétienne issue de France. Sur la colline, à la fois poumon vert et grand parc d’attractions, cohabitent le cimetière et le jardin d’enfants, le stade et l’université. Dans les multiples allées couvertes de grands arbres, l’été on chemine ou on court, l’hiver on pratique le ski de fond. Une évocation parmi d’autres de la mosaïque de visages qu’a su acquérir Montréal où parfois le Saint-Laurent fait penser à la Seine et le mont Royal à Montmartre... toutes proportions gardées.

Montréal
v. et région admin. du Québec, sur l'île de Montréal (entre le Saint-Laurent et la rivière des Prairies); 1 017 660 hab. (aggl. urbaine 3 300 000 hab., dont près des deux tiers sont francophones). Import. port fluvial et maritime. Grand centre industr. (bénéficiant d'une abondante hydroélectricité) et comm.; métropole culturelle et financière. Montréal est le siège de l'AUPELF-UREF (V. francophonie).
Archevêché cathol. Universités. Musée des beaux-arts. Biodôme (musée de la nature et de l'environnement). Exposition universelle en 1967. Jeux Olympiques en 1976.
La région admin. de Montréal a 499 km² et 1 822 516 hab. Le sud de l'aggl. de Montréal fait partie de la rég. admin. de Montérégie. Hist. - La ville, fondée en 1642 par Maisonneuve et baptisée alors Ville-Marie, se développa autour du mont Royal. Elle prit son essor après que l'ouverture du canal de Lachine (1822) eut permis d'éviter les rapides de Lachine. Ensuite, Montréal devint un carrefour ferroviaire capital qui bénéficia de la mise en valeur des Prairies. La pop. est passée de 250 000 hab. en 1900 à 600 000 en 1920, 1 million en 1945, 2 millions en 1970. C'est, depuis cette date, l'une des places comm. et fin. les plus importantes du monde.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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